Page 116 - #BalanceTonPresident
P. 116
1 er novembre 2019
au patron de bénéficier d’une coursière à vil prix, avant de démissonner
en claquant la porte. Déjà ! J’ai finalement opté pour un vrai travail de
coursière sur ma mobylette, mais la paye au rendement ne valait pas le
danger. J’ai alors pu profiter de mes premières indemnités de survie en
les entrecoupant de périodes d’activités rémunérées. Je n’étais pas encore
financièrement obligée de travailler et pouvais donc imposer mes condi-
tions. C’est un souvenir lointain qui me ramène à cette idée de revenu
minimum. Ne pas être contraint pour travailler comme on le souhaite.
À défaut de vendre mes photos, j’ai trouvé un emploi intéressant et
assez bien payé dans un journal, où j’ai passé une dizaine d’années.
Nous avions de nombreux avantages, obtenus grâce aux luttes des ou-
vriers du Livre et de façon plus générale, à celles des syndicats depuis
plus d’un siècle. Je ne travaillais pas à plein-temps pour pouvoir m’oc-
cuper aussi de mes enfants. Mon salaire en était réduit d’autant, mais
les allocations familiales et de logement permettaient de joindre les
deux bouts. Si j’avais eu un revenu minimum, je n’aurais pas eu besoin
de ces subventions calculées au nombre d’enfants engendrés. Si un tel
revenu, même minoré, avait été versé à mes enfants dès leur naissance,
ils auraient pu envisager le travail comme une participation collective
plutôt que comme une contrainte personnelle.
L’autonomie, qui plus est pécuniaire, est d’une grande importance
dans la vie. Un enfant ne devrait pas être dépendant financièrement
de ses parents, tout comme dans un couple, il n’est pas raisonnable de
dépendre de l’autre. Imaginons un revenu versé dès la naissance aux
parents pour subvenir aux besoins de l’enfant qui pourrait, quant à lui,
faire valoir son indépendance dès qu’il le souhaiterait.
Imaginons un couple où chacun aurait l’autonomie financière de
son quotidien. Le monde tournerait alors à l’encontre de multiples
dominations, et ce, pour notre plus grand bien.
Quand sont venus les temps des licenciements, d’une entreprise à
l’autre, j’ai pu tester les régimes successifs de l’assurance-chômage. Je
me souviens particulièrement de la grande bataille des recalculés au
début des années
000. Près de 00000 chômeurs avaient vu leurs
droits amputés ou supprimés suite à l’agrément d’une obscure conven-
tion. Saisi par plusieurs associations, le Conseil d’État décida de leur
donner raison en se basant sur un vice de forme, mais la question de
fond resta lettre morte. Le chômeur est-il un parasite ou la victime
d’un système qui lui impose cette condition ?
Je pense à tout cet argent dépensé pour évaluer, contrôler, faire et dé-
faire les plans contre ce fléau que serait le chômage. Car il n’y a que